lundi 25 août 2008

La haute saison chez les bouquinistes

Société/ Bouquinistes

Démocratiser l’accès aux livres

Bouillon de culture

Labhaira qui signifie potager mérite bien son surnom : on y trouve effectivement toutes les cultures nutritives, tant pour le corps que pour l’esprit. Des fruits et légumes côtoient des livres anciens que le lecteur averti ne trouvera qu’ici. Ce vieux quartier de Casablanca jadis (au début du siècle) réservé aux autochtones au plein centre de la ville européenne est aujourd’hui aussi un bouillon de toutes les cultures : on y trouve des manuels scolaires pour tous les âges et tous les cycles de formation ainsi que les best seller de la littérature mondiale. Quelque soit pour le secteur privé ou le secteur public, ne cherchez plus le livre rare car sa seule adresse est Labhaira de Casablanca. C’est avec un beaucoup de nostalgie que Abderrahim Meddoun, membre de l’association des bouquinistes de Casablanca nous parle de l’historique de ce lieu inédit «Labhaira était limitée au nord par le boulevard el hansali, à l’ouest par le boulevard el Mouahhidines, dernier rempart avant le majestueux Océan Atlantique, et à l’est par la fameuse avenue des FAR, et au sud, par la place de la concorde. Et d’ajouter «En plus des meilleurs bouquins, nous trouvions sur place les meilleurs mets traditionnels et gastronomiques, les meilleurs habits de mode et anciens, les auberges pour étudiants et jeunes de toutes nationalités». L’orateur renchéri «Dans les années soixantes et soixante dix, Labhaira était le centre névralgique de la capitale économique du Maroc, c’est le coin le coin le plus historique de la ville avant même les Habous». Abderrahim ne s’arrête pas là pour faire les louanges de son quartier préféré «la renommée de ce lieu de culture et de convivialité dépasse les frontières de notre pays». En effet, les bouquinistes de la capitale économique ont profité du prestige de ce lieu mythique pour fonder leur association en 1966. Selon Abderrahim Meddoun, le but de ces bouquinistes était de promouvoir la culture en générale et faire prendre conscience aux citoyens de l’intérêt du livre. Toujours d’après Abderrahim, l’autre motivation de ces professionnels du livre, majoritairement analphabètes au début, était de créer une atmosphère d’entraide entre eux pour améliorer leurs situations économiques et sociales.
Autrefois Labhaira attirait tous les mordus du livre de tout le Royaume et même du monde entier. Aujourd’hui, avec la mondialisation, l’Internet, et le changement des valeurs des jeunes qui préfèrent les CD et autres gadgets à la lecture, il faut un effort de mobilisation de l’électorat afin de redorer le blason de ce quartier historique de Labhaira. Abdrrahim Meddoun est totalement conscient de cet effort qui va selon lui donner un souffle nouveau à la production culturelle nationale «Nous sommes totalement mobilisés au sein de notre association derrière notre président Youssef Bourra afin de faire des expositions de livres une priorité». Et d’ajouter «Nous devons redoubler d’efforts afin de nous rapprocher de notre clientèle cible que représentent les couches modestes de notre société». Dans le registre des manifestations de l’association des bouquinistes de Casablanca à venir, Abderrahim Meddoun précise «Nous préparons en collaboration avec nos confrères de place Serraghna une exposition au grand public que nous voulons garder comme une habitude annuelle en cas de la réussite de la première édition». Le moins que nous puissions souhaiter à ces «moudjahiddines» de notre nouvelle ère est une réussite de leur initiative prochaine car la société toute entière à besoin de leurs lumières.




Hors texte :


Des clients passionnés de linguistique
et de philosophies orientales.

Ce qui se vend le mieux d’après Abderrahim Meddoun ce sont les sciences sociales. D’après lui, «il y a un engouement pour la philosophie, la sociologie, à l’éthnologie, et surtout à la linguistique». Et d’ajouter « il y a quelques jours, j’ai eu une commande très importante des ouvrages d’Ibn Khaldoun de la part d’une école privé ; ces écoles privés qui représentent notre meilleure clientèle». Et d’ajouter « J’ai eu un jour quelques centaines de livres de philosophie et de linguistique. Je les ai vendus en moins d’une semaine !»
La curiosité intellectuelle de ses clients est sans frontière. Les philosophies orientales, comme tout ce qui touche à l’ésotérisme, au mystère, restent un très bon créneau : yoga, taoïsme, bouddhisme. « Les livres loin de la culture traditionnelle, voire en rébellion avec elle, fascinent» a pu observer le bouquiniste.
A contrario, on observe chez ces lecteurs, une véritable recherche sur l’identité marocaine, le passé du Maroc. C’est ainsi que « les Marocains sont très friands actuellement d’ouvrages écrits par les Français durant la période du protectorat sur leurs mœurs, estimant, à tort ou à raison que ce travail n’a pas été fait sérieusement par les Marocains eux-mêmes » ajoute Abderrahim.
En littérature, les goûts à Casablanca obéissent d’après notre bouquiniste à des règles souvent mal définies. « Marcel Pagnol se vend très bien et Marcel Aymé pas du tout !» Toujours selon lui, bons ou mauvais, les best-sellers Weber, Coehlo, Stephen King restent rarement longtemps en rayon. Les auteurs maghrébins séduisent toujours : Chraïbi, Khattabi,etc, et répondant certainement à un goût d’exotisme, les auteurs japonais et sud américains, de Garcia Marquez, Vargas à Mishima passionnent. « J’ai d’ailleurs une forte demande concernant la Chine et tout l’Extrême orient surtout en ces temps des jeux Olympiques de Pékin.

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